M. Koné sert aux détracteurs du Cfa la garantie de stabilité monétaire comme argument solide pour justifier le choix de cheminer sur le registre actuel. A la place d’une éventuelle dévaluation annoncée par certains, il plaide pour la diversification de nos économies pour faire face à la baisse des réserves de change occasionnée par la chute des cours des matières premières.
« On ne sort pas d’une monnaie qui vous appartient », « Vous voulez qu’on sorte et qu’on n’aille où ? », « Ce que nous avons au compte d’opération c’est une goutte d’eau », « La stabilité des prix permet de maintenir le pouvoir d’achat des populations ». Ce sont, entre autres, quelques déclarations fortes de M. Tiémoko Meyliet Kone, Gouverneur de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Bceao) face à un Alain Foka de Radio France Internationale (Rfi) déterminé à arracher des révélations, pour agrémenter son émission « Le Débat Africain ».
Cette sortie était tant attendue dans un contexte où le débat est finalement pollué par une kyrielle de notes discordantes qui, parfois, embrouillent le consommateur lambda de l’Union Monétaire Ouest Africaine (Umoa). Ainsi, dans un langage clair et accessible, surtout loin des considérations techniques, M. Koné s’est prononcé à cœur ouvert pour clarifier beaucoup de choses, lever des équivoques et calmer l’ardeur de certains activistes.
D’un ton ferme, il lance : « Le Cfa c’est nous. C’est notre monnaie. C’est une monnaie qui a été appropriée. Si vous suivez la chronologie des choses qui se sont passées, même l’institution, la BCEAO, qui gère cette monnaie, a été africanisée depuis 1978. Il n’y a aucun cadre extérieur à la BCEAO. Le premier gouverneur africain a été nommé en 1975, Abdoulaye Fadiga, paix à son âme. Et tout ce qui a été construit comme réforme pour que nos pays arrivent, aujourd’hui, à être les zones de croissance les plus fortes dans le monde actuellement, c’est parce que tout simplement il y a eu un travail qui a été fait pour cette monnaie ».
Comme pour couper l’herbe sous le pied des détracteurs du franc Cfa, le gouverneur de la BCEAO cache mal sa frustration de devoir expliquer et convaincre que des pays africains qui, après leur indépendance, ont délibérément décidé d’avoir une monnaie africaine et de la mettre comme un ciment dans une intégration monétaire; que certains s’entêtent de dire que c’est une monnaie française. A son avis, l’acronyme n’a pas beaucoup d’importance mais plutôt ce que l’arrimage du franc Cfa à l’euro apporte à nos pays.
Contrairement à ceux qui voient une volonté pour la France de garder la main sur ses anciennes colonies, M. Koné rejette en bloc et assure que c'est la BCEAO, toute seule, de qui décide de la quantité de billets à imprimer de même que les éléments qui doivent y figurer.
Avant de préciser que malgré la présence de la France dans le Conseil d’administration de la Banque Centrale, il n’est aucunement question d’aller prendre des directives à Bercy. D’après M. Koné, « il y a des structures, il y a des rencontres que nous avons mais qui sont de nature à tout simplement passer en revue l’ensemble des accords que nous avons pour voir si leur fonctionnement est optimale ou pas. Mais aucune décision prise ici, en tout cas dans cette maison (BCEAO, ndlr) tant dans la gestion de la banque que dans celle de la politique monétaire, n’est prise à Bercy ».
Et de souligner que l’administrateur de la France qui siège dans le Conseil d’administration n’a pas de pouvoir de décision. « Il n’a même pas, comme j’ai entendu dire, un droit de véto. Il n’a pas de droit particulier par rapport à un autre administrateur. Il exprime ses points de vue et ça c’est utile parce qu’on ne peut pas aussi, dans une banque centrale, gérer une monnaie qui est d’essence publique en étant dans le flou. Il faut que ça soit dans la transparence la plus totale. Si on doit prendre des décisions en votant, ce sera la majorité simple et c’est ce qui est prévu dans les textes ».
Avec une sérénité olympienne face à un Alain Foka « percutant », le gouverneur de la Banque Centrale met en exergue l’importance de la stabilité des prix qu’assure le franc Cfa aux économies des pays de l’UMOA. A l’en croire, cet état de fait permet d’abord de maintenir le pouvoir d’achat des populations.
De manière schématique, M. Koné explique : « Dans notre zone on peut dire que le taux d’inflation a été jusqu’ici très bas parce qu’il est très contrôlé. C’est pour cela que, dans l'UMOA, la ménagère va au marché en n’étant pas inquiète parce qu’elle ne sera pas surprise que le prix du riz ait été multiplié par dix ou a augmenté de façon incontrôlée. C’est aussi le cas d’un malade qui va dans une pharmacie. Il se rassure que les prix des médicaments auxquels il a accès d’habitude n’augmenteront pas de façon exponentielle pour ne pas lui permettre de pouvoir en disposer ».
Même son de cloche pour les entreprises qui, sans cette stabilité, vont produire à des coûts qu’elles ne maîtrisent pas et qui peuvent changer du jour au lendemain. A quel prix devrait on échanger cette embelli e qui est la résultante d’une politique monétaire bien structurée ? Laissons nos langues au chat.
Le gouverneur de la BCEAO refuse de qualifier cette situation de confort. A la place, il parle denécessité parce qu’«une économie pour pouvoir croître a besoin que les gens aient une vision ; qu’ils puissent planifier ; qu’ils puissent se projeter éventuellement ».
Rétablir le pont avec la zone CEMAC
L’existence de deux zones utilisant le franc Cfa (UMOA et CEMAC) sonne toujours troublante aux yeux de certains observateurs. Le problème est que cette même monnaie, qui permet d’effectuer des transactions entre les pays de ces deux régions, dopant ainsi leurs potentialités économiques ne s'échange plus entre les deux zones, alors car à un certain moment, les billets de la zone CEMAC et ceux de la zone UMOA s’échangeaient et sans difficulté.
Interpellé sur ce fait, le gouverneur convoque l’histoire et met à nu la confusion faite sur la question. Thiémoko Meyliet Koné précise que l’UMOA a été créée en 1962 alors que la zone CEMAC est portée sur les fonts baptismaux en 1972.Il assure la volonté des autorités des deux régions de rétablir ce lien au bénéfice des populations.
« Nous sommes en train de réfléchir pour reprendre cela. Mais ce qui bloque c’est qu’entre temps, il y a eu de nouvelles normes sur le financement du terrorisme, sur le blanchiment des capitaux. C’est des règles qui sont très rigides et qui doivent être respectées scrupuleusement ». Il rappelle toutefois avec force que les deux francs Cfa continuent d''être échangés entre les deux zones, à travers le circuit normal des transferts bancaires, qui est un circuit contrôlé et sécurisé.
M. Koné juge considérable, par ailleurs, le fait que le franc Cfa soit une monnaie convertible qui suscite l’intérêt chez d’autres pays et opérateurs.
D’où l’intérêt aussi, pour lui, de l’arrimage du franc Cfa à l’euro. A son avis, « si les investisseurs qui viennent dans nos pays n’avaient pas la possibilité avec la convertibilité du franc Cfa de pouvoir faire les transactions extérieures, il y a longtemps qu’ils se seraient arrêtés. Si nos propres opérateurs qui ont besoin de faire des transactions à l’extérieur ne pouvaient pas le faire parce que la monnaie n’est pas convertible, ce sera arrêté ».
Diversifier l’économie à la place d’une dévaluation
Avec la chute du cours des matières premières, les réserves de change ont baissé considérablement. Et de façon officieuse, on parle de plus en plus d’une menace de dévaluation. Les stigmates laissés par celles de 94 sont encore béants. Les menaces de crise sociale dans les pays de la zone franc ne sont pas à négliger.
Pour rassurer, le gouverneur de la Banque Centrale confie que « la dévaluation n’est pas inscrite à un ordre du jour que je connais ». A son avis, la dévaluation n’est pas la seule solution aux problèmes de baisse des réserves de change et de baisse d’activités.
En guise de solution, la Banque Centrale recommande l'accélération de la diversification et de la transformation structurelle de nos économies. Ce qui, de l’avis de M. Koné, peut permette de rétablir les équilibres et faire de telle sorte que les économies de l'UEMOA soient plus résilientes, prospères et inclusives pour les différentes couches sociales de la population.
Allafrica.com
« On ne sort pas d’une monnaie qui vous appartient », « Vous voulez qu’on sorte et qu’on n’aille où ? », « Ce que nous avons au compte d’opération c’est une goutte d’eau », « La stabilité des prix permet de maintenir le pouvoir d’achat des populations ». Ce sont, entre autres, quelques déclarations fortes de M. Tiémoko Meyliet Kone, Gouverneur de la Banque Centrale des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Bceao) face à un Alain Foka de Radio France Internationale (Rfi) déterminé à arracher des révélations, pour agrémenter son émission « Le Débat Africain ».
Cette sortie était tant attendue dans un contexte où le débat est finalement pollué par une kyrielle de notes discordantes qui, parfois, embrouillent le consommateur lambda de l’Union Monétaire Ouest Africaine (Umoa). Ainsi, dans un langage clair et accessible, surtout loin des considérations techniques, M. Koné s’est prononcé à cœur ouvert pour clarifier beaucoup de choses, lever des équivoques et calmer l’ardeur de certains activistes.
D’un ton ferme, il lance : « Le Cfa c’est nous. C’est notre monnaie. C’est une monnaie qui a été appropriée. Si vous suivez la chronologie des choses qui se sont passées, même l’institution, la BCEAO, qui gère cette monnaie, a été africanisée depuis 1978. Il n’y a aucun cadre extérieur à la BCEAO. Le premier gouverneur africain a été nommé en 1975, Abdoulaye Fadiga, paix à son âme. Et tout ce qui a été construit comme réforme pour que nos pays arrivent, aujourd’hui, à être les zones de croissance les plus fortes dans le monde actuellement, c’est parce que tout simplement il y a eu un travail qui a été fait pour cette monnaie ».
Comme pour couper l’herbe sous le pied des détracteurs du franc Cfa, le gouverneur de la BCEAO cache mal sa frustration de devoir expliquer et convaincre que des pays africains qui, après leur indépendance, ont délibérément décidé d’avoir une monnaie africaine et de la mettre comme un ciment dans une intégration monétaire; que certains s’entêtent de dire que c’est une monnaie française. A son avis, l’acronyme n’a pas beaucoup d’importance mais plutôt ce que l’arrimage du franc Cfa à l’euro apporte à nos pays.
Contrairement à ceux qui voient une volonté pour la France de garder la main sur ses anciennes colonies, M. Koné rejette en bloc et assure que c'est la BCEAO, toute seule, de qui décide de la quantité de billets à imprimer de même que les éléments qui doivent y figurer.
Avant de préciser que malgré la présence de la France dans le Conseil d’administration de la Banque Centrale, il n’est aucunement question d’aller prendre des directives à Bercy. D’après M. Koné, « il y a des structures, il y a des rencontres que nous avons mais qui sont de nature à tout simplement passer en revue l’ensemble des accords que nous avons pour voir si leur fonctionnement est optimale ou pas. Mais aucune décision prise ici, en tout cas dans cette maison (BCEAO, ndlr) tant dans la gestion de la banque que dans celle de la politique monétaire, n’est prise à Bercy ».
Et de souligner que l’administrateur de la France qui siège dans le Conseil d’administration n’a pas de pouvoir de décision. « Il n’a même pas, comme j’ai entendu dire, un droit de véto. Il n’a pas de droit particulier par rapport à un autre administrateur. Il exprime ses points de vue et ça c’est utile parce qu’on ne peut pas aussi, dans une banque centrale, gérer une monnaie qui est d’essence publique en étant dans le flou. Il faut que ça soit dans la transparence la plus totale. Si on doit prendre des décisions en votant, ce sera la majorité simple et c’est ce qui est prévu dans les textes ».
Avec une sérénité olympienne face à un Alain Foka « percutant », le gouverneur de la Banque Centrale met en exergue l’importance de la stabilité des prix qu’assure le franc Cfa aux économies des pays de l’UMOA. A l’en croire, cet état de fait permet d’abord de maintenir le pouvoir d’achat des populations.
De manière schématique, M. Koné explique : « Dans notre zone on peut dire que le taux d’inflation a été jusqu’ici très bas parce qu’il est très contrôlé. C’est pour cela que, dans l'UMOA, la ménagère va au marché en n’étant pas inquiète parce qu’elle ne sera pas surprise que le prix du riz ait été multiplié par dix ou a augmenté de façon incontrôlée. C’est aussi le cas d’un malade qui va dans une pharmacie. Il se rassure que les prix des médicaments auxquels il a accès d’habitude n’augmenteront pas de façon exponentielle pour ne pas lui permettre de pouvoir en disposer ».
Même son de cloche pour les entreprises qui, sans cette stabilité, vont produire à des coûts qu’elles ne maîtrisent pas et qui peuvent changer du jour au lendemain. A quel prix devrait on échanger cette embelli e qui est la résultante d’une politique monétaire bien structurée ? Laissons nos langues au chat.
Le gouverneur de la BCEAO refuse de qualifier cette situation de confort. A la place, il parle denécessité parce qu’«une économie pour pouvoir croître a besoin que les gens aient une vision ; qu’ils puissent planifier ; qu’ils puissent se projeter éventuellement ».
Rétablir le pont avec la zone CEMAC
L’existence de deux zones utilisant le franc Cfa (UMOA et CEMAC) sonne toujours troublante aux yeux de certains observateurs. Le problème est que cette même monnaie, qui permet d’effectuer des transactions entre les pays de ces deux régions, dopant ainsi leurs potentialités économiques ne s'échange plus entre les deux zones, alors car à un certain moment, les billets de la zone CEMAC et ceux de la zone UMOA s’échangeaient et sans difficulté.
Interpellé sur ce fait, le gouverneur convoque l’histoire et met à nu la confusion faite sur la question. Thiémoko Meyliet Koné précise que l’UMOA a été créée en 1962 alors que la zone CEMAC est portée sur les fonts baptismaux en 1972.Il assure la volonté des autorités des deux régions de rétablir ce lien au bénéfice des populations.
« Nous sommes en train de réfléchir pour reprendre cela. Mais ce qui bloque c’est qu’entre temps, il y a eu de nouvelles normes sur le financement du terrorisme, sur le blanchiment des capitaux. C’est des règles qui sont très rigides et qui doivent être respectées scrupuleusement ». Il rappelle toutefois avec force que les deux francs Cfa continuent d''être échangés entre les deux zones, à travers le circuit normal des transferts bancaires, qui est un circuit contrôlé et sécurisé.
M. Koné juge considérable, par ailleurs, le fait que le franc Cfa soit une monnaie convertible qui suscite l’intérêt chez d’autres pays et opérateurs.
D’où l’intérêt aussi, pour lui, de l’arrimage du franc Cfa à l’euro. A son avis, « si les investisseurs qui viennent dans nos pays n’avaient pas la possibilité avec la convertibilité du franc Cfa de pouvoir faire les transactions extérieures, il y a longtemps qu’ils se seraient arrêtés. Si nos propres opérateurs qui ont besoin de faire des transactions à l’extérieur ne pouvaient pas le faire parce que la monnaie n’est pas convertible, ce sera arrêté ».
Diversifier l’économie à la place d’une dévaluation
Avec la chute du cours des matières premières, les réserves de change ont baissé considérablement. Et de façon officieuse, on parle de plus en plus d’une menace de dévaluation. Les stigmates laissés par celles de 94 sont encore béants. Les menaces de crise sociale dans les pays de la zone franc ne sont pas à négliger.
Pour rassurer, le gouverneur de la Banque Centrale confie que « la dévaluation n’est pas inscrite à un ordre du jour que je connais ». A son avis, la dévaluation n’est pas la seule solution aux problèmes de baisse des réserves de change et de baisse d’activités.
En guise de solution, la Banque Centrale recommande l'accélération de la diversification et de la transformation structurelle de nos économies. Ce qui, de l’avis de M. Koné, peut permette de rétablir les équilibres et faire de telle sorte que les économies de l'UEMOA soient plus résilientes, prospères et inclusives pour les différentes couches sociales de la population.
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